« Le poids de l’océan » d’Heidi CULLINAN

Quatrième de couverture : Le lycéen Jeremey Samson n’a qu’une envie, se terrer sous sa couette et dormir jusqu’à ce qu’il puisse entrer à la fac. C’était sans compter l’arrivée fracassante dans sa vie d’un ouragan appelé Emmet Washington. Le major de promo en maths et informatique est non seulement magnifique, hardi, incroyablement intelligent – et intéressé par Jeremey – mais également autiste.

Mais Jeremey ne s’en soucie pas. Il est bien trop occupé à se blâmer, tout comme ses parents qui ne croient pas que la dépression puisse être une véritable maladie. Quand il atteint le point de rupture, Emmet le sauve et l’accueille comme colocataire à Roosevelt, un établissement atypique pour personnes dépendantes.

À mesure que Jeremey reprend doucement pied, Emmet commence à croire qu’il peut être aimé au-delà de son autisme. Mais avant de lui faire suffisamment confiance pour se laisser aller à l’aimer, Jeremey doit trouver la force de croire en ses propres mots, de croire que l’amitié soigne l’âme et que l’amour peut surmonter tous les obstacles.


Une belle histoire qui ouvre à la tolérance et sensibilise au handicap encore bien trop stigmatisé actuellement. Le sujet est traité sainement et avec beaucoup de pudeur, à découvrir vraiment !


Le poids de l’océan est une romance m/m pas comme les autres. J’ai profité d’une promotion de la maison d’éditions pour l’acquérir, je l’avais repéré sans me lancer, pourtant c’était un tort car le roman est très juste, pas de fioritures inutiles, pas d’excès de bons sentiments, pas de surréalisme non plus, et surtout l’ensemble n’est pas romancé, au contraire, la partie romance est réaliste et tout à fait plausible avec ces petites imperfections qui en font une jolie histoire touchante, sensible et convaincante. On touche du doigt un réalisme frappant et déboussolant sur des sujets presque tabous, l’amour, la sexualité et la vie de couple de personnes ayant un handicap qu’il soit visible ou non.

Emmet est très intelligent, adore regarder passer les trains et compter les lézardes sur les trottoirs. Emmet est autiste. Avec le soutien infaillible de sa famille, il vit au plus proche d’une normalité définie par la société, ils ont fait en sorte que dans la vie tout se passe pour le mieux pour lui. Ce dernier a un secret, depuis quelque temps, il regarde Jeremey dans son jardin, Jeremey qui ne sourit pas, qui n’a qu’un seul ami, Jeremey qui le fascine,  Emmet souhaitant qu’il devienne son petit ami tout simplement. A l’occasion d’une fête des voisins, Emmet se décide à aller à la rencontre de Jeremey, si ce dernier est d’abord déstabilisé par l’attitude d’Emmet, les deux adolescents deviennent rapidement ami, jusqu’au jour où un acte inconsidéré de Jeremey nécessite une attention particulière. De là, les deux jeunes hommes vont mutuellement s’aider à affronter leurs « faiblesses » et les difficultés qui se présenteront à eux.

Les deux personnages sont très différents l’un de l’autre et ceci est d’autant plus marqué par leurs pathologies psychologiques respectives mais aussi par leurs contextes familiaux très opposés.

Emmet, c’est la force intelligente et directe avec une famille aimante qui le soutient, s’adapte et fait en sorte que sa  vie soit la plus facile possible. C’est un personnage absolument génial qui m’a complètement conquise. Sa façon directe de dire les choses, de les penser voire même de les ressentir, sans aucun filtre et qui ne comprend pas pourquoi on se complique la vie avec des choses qui ne se disent pas ou ne se demandent pas. Sa franchise, sa nature, ses émotions vives et sincères nous donnent un tout autre regard sur l’autisme. C’est un personnage qui sait ce qu’il veut et qui va se heurter à ce regard critique comme quoi l’amour, ou que du moins vivre une relation amoureuse, n’est pas forcément accessible à son handicap. J’ai complètement craqué pour ce personnage masculin sexy, amusant et franc qui ne triche pas. Emmet est donc très direct, mais l’envers du décor est qu’il ne supporte pas le contact des autres et a beaucoup de mal à définir leurs émotions avec une personnalité méticuleuse, maniaque, qui nécessite une organisation bien particulière pour vivre avec un minimum de sérénité.

Jeremey, c’est l’inverse, il parait plus fragile, son handicap ne se voit pas, et est donc certainement moins « compréhensible » pour les autres. Sa famille en tête qui ne le soutient pas du tout et ne lui demande que d’être « normal ». La dépression et l’anxiété chronique, c’est l’angoisse des grands espaces, des bruits un peu forts, de l’agitation d’une foule, la peur de traverser un magasin pour atteindre un rayon spécifique, tout autant de choses qui, pour ceux qui ne ressentent pas ces peurs, sont moins intuitifs et je suis la première à avoir du mal avec cette pathologie. Très sincèrement, l’ouvrage m’a ouvert les yeux, m’a permis de comprendre certaines choses sur la psychologie humaine, ses défaillances, indépendantes de notre volonté propre. Jeremey est donc très sensible, a besoin de soutien, de contact aussi et vit dans l’émotion intense avec un côté bordélique puisqu’il n’arrive plus à isoler ses différents besoins.

Tout deux sont donc des antithèses de caractère et de personnalité, mais ils s’aident l’un et l’autre même. Si Emmet est certainement le pilier central de la relation, Jeremey est aussi un soutien indispensable pour Emmet, qui découvre ainsi qu’il peut être aimé comme il est et peut aussi avoir le droit de vivre une histoire d’amour. Là où l’autisme d’Emmet m’a passionnée, la dépression de Jeremey m’a un peu plus déstabilisée, mais au final, je porte un regard nouveau sur le sujet. Je les ai trouvés beaux tous les deux, beau dans leur courage, beau dans l’acceptation de leur pathologie, beau dans leurs sentiments l’un pour l’autre. La relation amoureuse est tendre mais aussi très naïve et innocente, les deux personnages découvrent l’amour, le contact physique, là aussi une chose qui demande d’être très attentif. Leur handicap nécessite qu’ils apprennent ensemble doucement, sans que cela viennent heurter leur propre fragilité, chacun a leur rythme et cet apprentissage tout en douceur, pas forcément romancé mais plutôt adapté à leur innocence, est très bien traité.

Vous l’aurez compris, autisme, dépression ou anxiété chronique, mais aussi tétraplégie, à travers un personnage secondaire, sont autant de sujets balayés par l’auteure même si elle se concentre essentiellement sur les deux premiers, que le handicap soit visible ou non, ils ont tous une importance, et ouvrent à des notions de différence, de tolérance mais aussi de compréhension et d’ouverture d’esprit. Ce roman n’est pas toujours facile, peut mettre en colère face à l’injustice, mais c’est surtout un condensé d’espoir pour toutes les personnes concernées, avec un message important, l’amour est accessible à tous.

L’auteur semble s’être très bien documentée, elle a parfaitement su s’adapter à l’un et à l’autre de ses personnages, puisque l’on change de point de vue régulièrement, elle a su bien les distinguer en fonction de leur pathologie psychologique respectve. Elle a su également apporter un peu de légèreté avec les nombreux clins d’oeil au film des Blues Brothers ou la chanson « Happy », de l’humour qui vient dédramatiser les sujets abordés. Ainsi, les émotions sont variables pour le lecteur.

En bref, une belle romance certes mais surtout un roman qui ouvre les cœurs et les esprits. Le choix de l’auteur d’user de deux personnages abîmés psychologiquement renforce cette histoire, une belle façon de démontrer que la normalité est une notion toute relative et que le handicap doit faire intégralement partie de notre société sans en être exclu ou marginalisé. Une vision des choses qui m’a beaucoup plu. N’hésitez plus à lire cet ouvrage !

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Un commentaire pour « Le poids de l’océan » d’Heidi CULLINAN

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